Qu’est-ce qui distingue l’IoT à destination des entreprises des objets connectés visant le grand public ? Pour bien comprendre ce qu’est l’Internet des Objets et où réside sa valeur pour les entreprises, il faut revenir sur les origines et les bases du concept.
Le réseau Internet a fêté ses trente ans en 2019. En dématérialisant les échanges, il a permis le développement de nouveaux écosystèmes numériques, alimentés par des données fournies par les utilisateurs et par les systèmes informatiques.
Il était cependant complexe d’y intégrer des informations issues du monde analogique, difficiles à collecter et à retranscrire dans un format numérique. Nous nous sommes alors accoutumés à considérer le monde digital et le monde physique comme deux domaines distincts en termes d’applications.
Aujourd’hui, avec l’Internet des Objets ou Internet of Things (IoT), cette séparation est en passe de voler en éclat. L’IoT offre en effet la capacité de connecter le monde digital au monde physique sur une très grande échelle, grâce à des technologies avec un faible coût d’entrée. Ainsi, la connaissance du monde réel peut désormais s’appuyer sur des données.
Pour les entreprises, cette possibilité ouvre la voie à de nombreux services à forte valeur ajoutée : les données peuvent être utilisées pour optimiser et automatiser leurs processus, pour capter de nouvelles sources de valeur, pour mettre en œuvre des interactions avec les environnements physiques ou pour anticiper la survenue d’événements.
C’est dans le monde industriel que l’Internet des Objets trouve ses racines, plus particulièrement dans les dispositifs M2M (Machine-to-Machine). Ces derniers ont permis à des machines d’échanger des informations sans intervention humaine, en combinant capteurs intégrés aux équipements industriels, réseaux et technologies d’identification et de traçabilité comme le RFID. Les premières applications sur large échelle ont vu le jour dans le milieu des années 90, portées par l’essor des réseaux GSM.
L’arrivée des objets sur le réseau IP, le protocole de base d’Internet, est un peu plus tardive. Celle-ci a débuté du côté du grand public. Pour la petite histoire, parmi les premiers objets connectés figure un distributeur de Coca-Cola situé à l’Université Carnegie Mellon. Au début des années 80, des ingénieurs l’ont relié au réseau pour vérifier à distance si des boissons fraîches étaient en stock. Toujours aux USA, John Romkey a présenté en 1990 un grille-pain connecté à Internet. En France, la société Violet, connue pour ses lapins Nabaztag, a fait figure de pionnière avec une lampe connectée présentée en 1994.
En 1997, le prospectiviste Paul Saffo fait paraître un article visionnaire sur les capteurs, qui selon lui seront à l’origine de la prochaine grande vague d’innovation du secteur informatique. « Que se passe-t-il quand nous donnons des yeux, des oreilles et d’autres organes de perceptions aux machines », s’interroge-t-il. « Inévitablement, nous allons demander à ces machines de répondre à ce qu’elles perçoivent, de manipuler le monde autour d’elles. »
Enfin, c’est en 1999 que le concept d’IoT apparaît pour la première fois, utilisé par Kevin Ashton, directeur du centre Auto-ID au MIT (Massachusetts Institute of Technology).
L’Internet des Objets s’inscrit à la croisée de plusieurs domaines technologiques, arrivés à maturité au même moment :
Même si les objets connectés pour le grand public sont les plus médiatisés, ce ne sont pas forcément eux qui produisent le plus de valeur. Selon les analystes de McKinsey, 70% de la valeur générée par le marché de l’IoT est portée par les usages interentreprises, ou BtoB (Business-to-Business).
Sur le marché BtoB, les projets IoT sont guidés par les cas d’usages. Il s’agit de résoudre des problèmes concrets auxquels sont confrontées les entreprises.
Ceux-ci s’articulent autour de trois grands enjeux, illustrés par des exemples :
Dans un secteur comme la logistique, des matériels comme les chariots rolls sont fréquemment égarés, ce qui représente un coût élevé. En équipant ces chariots de capteurs GPS, ils peuvent être localisés en permanence, une source d’économie importante pour les entreprises.
Dans le bâtiment, la consommation énergétique est souvent difficile à optimiser. En connectant les salles, il devient possible d’ajuster l’éclairage et le chauffage en temps réel, en se basant sur leur occupation.
Une entreprise chargée de livrer des bouteilles de gaz aux professionnels peut équiper celles-ci de capteurs, afin de savoir quand elles sont bientôt épuisées. Elle peut ensuite préparer ses tournées et les optimiser.
Un distributeur d’eau ou d’énergie peut de son côté placer des capteurs en différents points stratégiques de son réseau, afin d’analyser en temps réel le fonctionnement des équipements. Cela lui permet de planifier d’éventuelles réparations et de prévenir les pannes.
Une société qui gère des parkings privés peut installer des capteurs pour savoir quand les places sont inoccupées : celles-ci peuvent alors être louées et les revenus partagés entre gérant et propriétaires.
Au cours des dernières années, beaucoup d’objets connectés ont été développés pour le marché BtoC (Business-to-Consumer). Le « quantified self », tendance consistant à collecter des données sur soi-même en tant qu’individu, ainsi que la domotique, ont nourri la demande des consommateurs. Malgré tout, la promesse s’est souvent heurtée à la réalité des usages, avec par exemple des bracelets connectés dont l’autonomie ne dépassait pas deux jours.
À l’heure actuelle, c’est dans le monde BtoB que l’IoT trouve le plus d’opportunités. Il permet notamment d’intégrer les systèmes d’information (IT) avec les systèmes opérationnels (OT), ce qui permet de repenser entièrement certains processus comme la production, la chaîne d’approvisionnement, la maintenance ou la sécurité.
Si dans le monde BtoC c’est l’objet qui prime, dans le monde BtoB c’est le service. Ce qui différencie l’IoT BtoB d’un objet connecté, c’est le coût négligeable de l’objet et de la connectivité par rapport au service rendu.
L’objectif est d’obtenir un retour sur investissement rapide, avec un objet le plus simple possible, mono-usage. Ainsi, dans l’agriculture, quelques capteurs bien placés (humidité, pluviométrie, ensoleillement…) suffisent à faire économiser des milliers d’euros pour une exploitation, en lui permettant d’ajuster très finement sa consommation d’eau. Un smartphone en revanche se positionne plutôt comme objet connecté, à la fois de par son coût élevé et ses multiples usages.
A retenir
L’IoT, c’est quand un capteur envoie une donnée vers une plateforme à travers un réseau, à un coût faible par rapport au service procuré.
Le monde BtoB offre de nombreuses opportunités pour l’IoT
Les projets IoT BtoB sont guidés par les cas d’usage : le service rendu prime sur l’objet